Jeanne Dortzal

Jeanne Dortzal

Conseil

Conseil

 

La solution? Partir ventre à terre

            Vers la clarté.

Enfonce ton ciel, ton ancien repère,

            Printemps, été

Se redonneront à toi. l'âme opère

En silence, son but nargue l'éternité.

 

Oui, vieux, voici l'heure, et cette heure est forte

             Parce que Dieu,

D'un coup de reins, vient d'enfoncer la porte.

             Le mauvais lieu

Vraiment, pour un poète. Fais en sorte

D'y laisser ta savate, et viens, mon fieu.

 

Tu sangloteras sur l palier? certes,

             A croupetons,

Comme un tout-petit aux chandelles vertes,

             Mais nous partons,

Et vers l'avenir, gueules ouvertes,

L'oubli sur l'épaule et sous les têtons.

 

L'amour? Va-t-en voir au loin s'il existe...

             Moins sûrement

Que ce coup au coeur qui chante et persiste,

             Quand le ciel qu'on fend

N'est plus qu'un trois-mâts aux tons d'améthyste

Qu'on gouverne seul, et par tous les temps.

 

Es-tu prêt, petiot? Voici mon épaule

             Et son bissac;

Peut-être irons-nous au delà du pôle;

             Mon coeur en vrac

Tangue, souffle, appelle, empoignant le môl

Où j'ai suspendu mon premier hamac.

 

Redécroche-le, mettons-nous en boule,

              Front contre front

Pour oublier. Quand les soleils qui roulent

              Nous reverront

Serons-nous tannés, bon Dieu! Quelle houle

Sur nos trognes: plus que deux potirons

 

Culottés par l'embrun et la routine,

              Mais plus vivants

Que tout ce qu'on respire et qu'un devine,

              Lorsque le vent

Vous plaque sous la peau et la rétine

La sensation d'aller plus avant.

 

D'un revers de coude essuyons nos ailes:

               Le but atteint

L'oubli? Décapité. des heures telles

               Sont un fortin,

Cadenassons-nous. A moins qu'on s'attelle

Une fois encore, quelque beau matin,

 

Pour remettre à flots ta vieille carcasse,

                Bateau rangé

Dans l'estuaire fou, buveur d'espace,

                Et protégé

Par ce puissant désir collant ma face

Sur tes hublots, étoile du danger.

 

Le credo sur la montagne, 1934.



27/11/2012
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