Jeanne Dortzal

Jeanne Dortzal

Mon lit est chaud comme une rose...

Mon lit est chaud comme une rose...


Entre. Mon lit est chaud comme une rose.
L'ombre a baissé les yeux; une odeur de mosquée

S'étire entre mes seins. J'ai remis toutes choses
À leur place éphémère et, les ayant masquées,


Leur ayant, goutte à goutte, infusé notre sang,

Les ayant fait s'agenouiller, demander grâce,

Et s'abstenir de tout serment, j'ai mis ma face

Contre le soir, j'ai détaché ce qui descend


De l'heure, et me voici. Que la chambre ait un cœur

Et batte. Quant à nous, nous userons du ciel
Avec un rythme égal, un peu surnaturel,
Comme il convient à deux amants drapés de pleurs.


Entre, j'ai préparé la nuit comme un berceau.

La cigogne, ma soeur, est debout vers la porte;

La volupté respire et nos corps sont si beaux

Que l'on croirait entrer dans une ville morte. 

 

A l'immobilité, joignons le cri farouche

Des bêtes en gésine. Hâtons-nous, hâtons-nous

D'étreindre ce qui passe! Et, jetant sur ma couche

              Ta crinière de loup,

 

Ton masque de soldat et mon manteau de fée,

Soyons ceux-là qui s'en reviennent, n'ayant rien

Qu'une outre de soleil et des clameurs de chien,

Et qui saluent la mort du bleu de leur épée.

 

Les Versets du Soleil, 1921


 



02/10/2012
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