Jeanne Dortzal

Jeanne Dortzal

Plus au Sud!...

Plus au Sud!...

 

Plus au Sud! et la mer s'est donnée. Et je vois!

L'Europe a fui dans un remous; l'espace appelle;

Le mur d'eau a heurté le triangle et la croix,

Le ciel recule en louvoyant et l'heure est telle

 

Qu'on voit tournoyer Dieu. Vaste éblouissement,

Etoiles en faisceaux que la distance aborde;

O silence antartique où le bateau géant

Retient l'autre moitié du ciel entre ses cordes.

 

Et la cale dont le soleil s'est goudronné,

Dites, comme on sent l'homme. Et ces balafres rousses

Sur ce plafond que la tristesse a maculé,

Tout ce qu'on ne voit pas et qui vit, par secousses.

 

Je laisserai ceux qui naviguent près des mâts

Pour suivre les soutiers qui mangent près des flammes;

Eux me raconteront le pays qui naîtra;

Je le verrai bouger sous le ventre des lames

 

Par ce trou bleu qu'on aperçoit dans un sursaut,

Et qui sert de lucarne et de torche au navire;

Ils auront le ciel libre et j'aurai ce hublot,

Mais c'est moi qui saurai que l'océan respire.

 

L'ai-je assez entendu quand je fuyais le port!

C'est bien le même souffle avec des alternances

Plus brutales. Un chant de soutier, calme et fort;

Comme je les confonds, ce soir, dans le silence,

 

Et que l'eau est joyeuse à force de désir.

Nous conduirais-tu donc, sans qu'on s'en aperçoive,

Vers ce qu'on a rêvé et qui chante à mourir

Bien au-delà des mers où ces miutes boivent.

 

 

La croix de sable, 1927.



16/12/2012
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