Sommeil...
Sommeil...
Sommeil, lac invisible où la mémoire plane,
Où la pensée aborde en se multipliant,
Parmi des herbes d'or, des coraux diaphanes,
Des palais sous-marins au bleu phosphorescent.
Eau lunaire qui bouge et condense en nuages
Le plus subil effort, le plus morne désir,
Pour que l'âme ait sa courbe unique en ses mirages
Et puisse graviter autour d'un souvenir.
O sommeil titubant, pourvoyeur du mensonge,
Toi dont ma tempe a soif, quand l'esprit indompté
Cherche dans l'infini cette clarté qu'on longe
Et qui n'est que le seuil du soir illimité.
Ouvre-nous ce vitrail immense qu'on devine;
Les lointains soupçonnés étoilent mon cerveau.
Je sens déjà frémir la chaude odeur marine,
Et le ciel qui moutonne a voilé mon berceau.
A l'enfant-voyageur qui traîne sa chaloupe,
Redonne les jardins lumineux du sommeil,
Le revoici couché dans son manteau d'étoupe,
La prunelle tournée en dehors du soleil.
***
Continents qu flottez comme des chevelures,
Méduses du silence aux irradiations;
Nébuleuse couchée en travers des voilures,
Nuit hyperboréenne où nous appareillons.
En spirales la nuit monte et boit la lumière,
Les écailles du vent ont déchiré le jour,
Et mon front qui tâtonne et que l'heure accélère,
S'éveille lourdement, comme saoulé d'amour.
La croix de sable, 1927
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