Jeanne Dortzal

Jeanne Dortzal

Remember

Remember

 

j'aime tes yeux pour leur mystère,

Et pour l'inexprimable émoi

Qu'ils firent naître, un soir, en moi,

Quand tu t'offris à ma misère.

 

Ce fut la veille de l'été,

Trois ans bientôt, dis, que t'en semble?

Que nous étions heureux ensemble!

Depuis, l'ai-je jamais été?

 

Je revois tout: le salon triste

Et mon fauteuil très près du tien,

Tu ne m'as rien dit, presque rien,

Pourtant ta voix, en moi, persiste.

 

J'ai murmuré: veux-tu ces fleurs,

Ces fleurs, que ma lèvre a touchées?

Puis, nos bouches s'étant cherchées,

Je crus défaillir sur ton coeur!

 

Plus tard, quand j'eus franchi ta porte,

Devant m'éloigner à jamais,

Je compris combien je t'aimais,

Combien ma tendresse était forte;

 

Car, en dépit des propos vains,

De ton mépris, de leurs mensonges,

J'ai pu cristalliser mes songes

Et nos instants les plus divins.

 

Pourtant, je souffre au fond de l'être,

Ma voix est pleine de sanglots,

Pour ne t'avoir pas dit les mots

Qu'il eût fallu dire, peut être...

 

Variations sur un même thème (Le jardin des Dieux, 1908)



26/01/2013
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