Jeanne Dortzal

Jeanne Dortzal

Enfant, m'a-t-on dit

Enfant m'a-t-on dit

 

Enfant, m'a-t-on dit, enfant qui crois en Dieu. Certes.

Car votre philosophie, hommes, n'est qu'un jeu

Pour étourdir l'esprit et saper, peu à peu,

L'immense continent gonflé de feuilles vertes.

 

Vos livres, que j'ai bus, ont assoifé mon âme;

Je les ai refermés avec un tel amour,

Etant fille du vent, dont j'ai refait le tour,

Pour y plonger mon front que la beauté réclame.

 

Pauvre être, m'a-t-on dit, pauvre être qui chemines

Loin des cités, loin des ornières, loin de tout;

Folle qui vas rêvant, sans crier casse-cou,

Que nous rapportes-tu de neuf? - Rien. Les mines

 

Où je descends ne renferment qu'une ou deux choses:

Un brin d'herbe, un caillou, je ne sais plus vraiment,

Sans doute la douleur, cette étoile qui pend

Comme une lampe et si riche en métamorphoses.

 

Croyez-moi, c'est assez pleurer pour ne rien dire.

Si chacun parcourait la terre sur ses poings,

Tous se rencontreraient. Dieu, mettant tout au point,

Moucherait ta chandelle, ô bonté qui respires.

 

L'Espérance, semblable à la fosse commune,

Nivèlerait les coeurs, rapprocherait nos os,

Et qui sait, si du fond des instants, les oiseaux

Ne viendraient pas chanter ainsi que de coutume?

 

Petite, m'-t-il dit, ah! petite, petite...

Mais ces mots-là, le vent les mit dans son coffret...

C'était un, qui est dans le trou où il fait frais,

Et au-dessus du trou pousse la marguerite.

 

Le credo sur la montagne, 1934.



26/09/2012
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