Mon lit est chaud comme une rose...
Mon lit est chaud comme une rose...
Entre. Mon lit est chaud comme une rose.
L'ombre a baissé les yeux; une odeur de mosquée
S'étire entre mes seins. J'ai remis toutes choses
À leur place éphémère et, les ayant masquées,
Leur ayant, goutte à goutte, infusé notre sang,
Les ayant fait s'agenouiller, demander grâce,
Et s'abstenir de tout serment, j'ai mis ma face
Contre le soir, j'ai détaché ce qui descend
De l'heure, et me voici. Que la chambre ait un cœur
Et batte. Quant à nous, nous userons du ciel
Avec un rythme égal, un peu surnaturel,
Comme il convient à deux amants drapés de pleurs.
Entre, j'ai préparé la nuit comme un berceau.
La cigogne, ma soeur, est debout vers la porte;
La volupté respire et nos corps sont si beaux
Que l'on croirait entrer dans une ville morte.
A l'immobilité, joignons le cri farouche
Des bêtes en gésine. Hâtons-nous, hâtons-nous
D'étreindre ce qui passe! Et, jetant sur ma couche
Ta crinière de loup,
Ton masque de soldat et mon manteau de fée,
Soyons ceux-là qui s'en reviennent, n'ayant rien
Qu'une outre de soleil et des clameurs de chien,
Et qui saluent la mort du bleu de leur épée.
Les Versets du Soleil, 1921
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