Tlemcen en plein midid
Tlemcen en plein midi
Un soleil immobile,
Des poussières d'alfa, une île
De silence et de poivre élargissant ses palmes,
Et, côte à côte, au creux des maisons calmes,
Des enfants accroupis léchant un gâteau d'huile.
Midi. Voici l'instant d'errer dans les écorces
Et les parfums, les reins creusés, blancs de fatigue,
Et l'on tangue, à travers des piments et des figues,
En écrasant Tlemcen contre sa chair. Sa force
Est d'être nue et bleue. On marche en la buvant
Comme certains ruisseaux que longent les gazelles;
A demi renversée et sa chemise au vent,
Des gouttes de soleil sur son ventre, elle est celle
Qu'on broie, et qui palpite, et ne se souvient guère.
Peti garçon du Sud ou princesse en haillons,
Elle est tout à la fois le cloaque éphémère
Et le jardin où l'âme a creusé son sillon.
Un invisible amour a brodé ses babouches;
Moite de souvenirs et de fumée, elle a
Sa robe de ruelle et son manteau d'agha.
Que lui importe l'heure? Une rose à la bouche
Et les versets du ciel contre son coeur, Tlemcen
S'offre en sourdine et passe. Une chanson mauresque,
Une voile, des colliers, presque un sourire, presque,
Et ma maison s'ouvrant ainsi qu'un cyclamen...
Les Versets du Soleil, 1921
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